DLC, une vision du verre à moitié plein

Selvaria a

Je me souviens encore de mon 1er DLC payant. C’était la mission Selvaria du mythique Valkyria Chronicles. A cette époque, j’ai remercié le Ciel d’avoir inventé les DLC, tant j’étais content de pouvoir incarner ce personnage que j’avais adoré lors de l’aventure principale, mais qui faisait malheureusement partie des “méchants”. Quelques 5 ans plus tard, les DLCs sont-ils toujours aussi enthousiasmants, ou le rêve est-il brisé?

En ce jour de fête de travail, il est bon de rappeler que tout travail mérite salaire. Un DLC est un travail, il est donc logique qu’il ait une valeur marchande. Je dis cela car j’ai été choqué des vociférations de certains quand TecmoKoei a annoncé le prix de l’irrésistible Marie-Rose, soit 6€. «trop cher», disaient les uns. «crevards», criaient les autres. Il est bon de s’arrêter un instant et de faire un peu de micro-économie : qu’est-ce qu’un prix? Un prix, c’est ce par quoi deux parties échangent un objet ou un service et seraient prêtes à recommencer dans les mêmes conditions. En d’autres termes, si le client achète et est satisfait, le prix est juste. En économie, il existe un concept qui s’appelle la consumer value. La consumer value, c’est le prix que tout un chacun attribue subjectivement à tel ou tel produit ou service, tout le travail de l’éditeur étant de trouver la moyenne de cette consumer value. Par exemple, ma consumer value de Hyperdimension Neptune Victory est de 135€ (puisque c’est le prix auquel j’y consenti pour le collector en import). A l’inverse, ma consumer value de Mario 3D World est de zéro, car même si on me le donnait je le le pendrais pas. Il en résulte par exemple que les DLCs Call of Duty sont eux aussi au bon prix. Je les trouve moi-même chers (surtout que le level-design des maps COD n’est en général pas extraordinaire), mais des millions de personnes les achètent année après année. Pourquoi mon opinion personnelle prévaudrait-elle sur la décision en conscience de millions d’autres? Au pire, on se dit que c’est une façon déguisée d’augmenter le prix global des jeux. Après, c’est à chacun de décider s’il accepte cette hausse. Quand on aime on ne compte pas.

Il ne faudrait pas non plus mettre tous les DLCs dans le même sac. Reprenons l’exemple de Valkyria Chronicles, car il est symptomatique de la grandeur et décadence des DLCs. Dans Valkyria Chronicles II sur PSP, Selvaria devient un DLC gratuit, le meilleur DLC qui soit, au mépris de la chronologie de la série puisque dans VCII, elle est censée être décédée (mais on s’en fout, parce qu’elle a des boobs et on l’adore). Un an plus tard, quelques semaines après la sortie de Valkyria Chronicles III au Japon, une mission DLC permettant de débloquer Selvaria apparaît sur le PSN pour… 600¥! Prix que j’ai payé sans broncher mais qui reste quand même nettement plus élevé que les 0€ de VCII. Dès lors, il faut établir la différence entre Selvaria de VC1, sortie plusieurs mois après le jeu pour répondre à l’attente des fans, Selvaria de VCII gratuite pour récompenser la fidélité des fans, et Selveria de VCIII planifiée pour augmenter la marge du jeu sur le dos des fans. Je ne dis pas que certains de ces DLCs sont scélérats ou ne devraient pas exister (puisque j’ai acheté et que je recommencerais dans les mêmes conditions), mais qu’il y a différentes approches du DLC, en que certaines sont mieux que d’autres et que les procès d’intentions ne sont pas justifiés. Dans certains cas, le DLC est même bénéfique : souvenez-vous de Wipeout HD, l’excellent épisode de feu la série de course futuriste de Psygnosis. Plutôt que de sortir une suite au prix plein pot, Sony a préféré sortir une extension qui ajoutait quasiment autant de contenu que l’original pour la moitié du prix. A l’inverse, peut-on admettre que les FIFA successifs sortent chaque année à 70€ malgré si peu de changement, chose à laquelle semblent acquiescer les journalistes de tous bords au mépris de l’intérêt des acheteurs? On me parle de physique du ballon, d’IA améliorée, mais ces changements pourraient fort bien faire l’objet d’une simple mise à jour. Quand Call of Duty ou Battlefield modifient la ballistique, le recul des armes ou le scope-in time, ça s’appelle màj un point quelque chose et pas le nouveau COD ou le nouveau Battlefield.

Après, vous allez me dire «tous ces DLCs, ils n’ont qu’à les mettre dans le jeu de base». Alors il faut se poser deux questions. Premièrement, le jeu de base est satisfaisant sans ses DLCs? Prenons Deus Ex Human Revolution : même sans son extension «The Missing Link», ce jeu est déjà un monument du WRPG et du récit d’anticipation, qui vaut largement les 60€ qu’il coûtait à sa sortie. Tales of Xillia n’est pas moins bon sans la pléthore de costumes DLC qui l’accompagnent, que chacun est libre d’acheter ou non en son âme et conscience. En revanche, les jeux Nintendo (qui souvent ne proposent aucun DLC payant) valent-ils forcément les jeux de base complexes et ambitieux des consoles concurrentes?

Après, il faut se demander si vraiment le contenu DLC a une logique dans l’aventure principale. J’entendais jaser il y a peu à propos des DLCs de Drakengard 3. Ce dernier propose des mini-scénarii dans lesquels vous incarnez les soeurs de Zero, celles-là même que vous massacrez sans vergogne dans le jeu principal. Ca n’a pas forcément à être sur la galette de base. Ca pourrait, mais le jeu doit bien sortir un jour! C’est bien beau de vouloir toujours plus, mais les développeurs ne peuvent pas développer pour l’éternité! En l’occurrence, SquareEnix a un calendrier et le jeu devait sortir pour les fêtes, ceci étant un impératif économique. Il était donc tout à fait impossible d’avoir tout cela pour le lancement. Même chose pour les DLCs de Metal Gear Rising Revengeance, le travail a commencé bien après. On est en revanche plus circonspect en jouant à Assassin’s Creed II : on se souvient que deux chapitres en plein milieu de l’histoire avaient été remis à plus tard en tant que DLC. Quoi qu’on en pense, il n’est pas normal de devoir passer du chapitre 11 au chapitre 13 dans l’aventure initiale. Dans le même esprit, Wilbell n’a pas à être un personnage DLC dans Atelier Escha&Logy. Personnage (jouable) majeur de Atelier Ayesha et qui plus est extrêmement populaire, elle avait était teasée bien en amont de la sortie du jeu et intervient du début à la fin de l’histoire. Imaginez ma colère quand j’ai découvert que je devais la payer 500 yens 1 mois après la sortie du jeu. Parlons encore de Final Fantasy XIII-2, de Prince of Persia : pourquoi devrais-je payer en plus pour connaître le fin mot de l’histoire?

En termes de DLC, c’est clair, on ne doit pas tout accepter. Mais acheter n’est pas forcément accepter. Je peux acheter un DLC et en être déçu, peut-être que j’achèterai pas la suite, ou j’irai le dire à l’éditeur via Facebook/Twitter… ce qui pourra à terme faire bouger les lignes et normaliser une utilisation dévoyée des DLCs (je remarque que Lightning Returns a beaucoup moins de DLCs que FFXIII-2, et surtout aucun important). Mais en tout état de cause, il est stupide de les diaboliser, de contester leur réalité économique et de nier le bonheur qu’ils apportent et les services qu’ils rendent à tant de joueurs à travers le monde.

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